Rencontres

Les petits ruisseaux font les grandes rivières 2

Je ne pouvais pas m’imaginer aider d’un point de vue logistique sans toucher à ma machine pour soutenir les couturières. Donc, lors d’une visite à l’atelier de découpe, j’en profite pour prendre quelques kits à livrer et en prendre pour Carmen et moi. 

Première blouse, 1h20 de travail!!! Alors oui, il faut le temps de prendre ses marques mais waw! Une blouse simple, sans pinces, avec des manches simples et quasi pas de technique…ça prend quand même du temps! 

Heureusement, demain, je vais coudre avec Carmen (en respectant les bases de distanciations sociales évidement!). On commence une blouse pour que je lui explique toutes les étapes et avec son passé de couturière, elle me montre déjà quelques astuces pour gagner du temps! Super! J’apprends et je vais pouvoir partager ces trucs et astuces aux autres! 

Très vite, on décide de passer en mode “Ford” ou “fabrication à la chaîne”. On découpe les étapes, j’assemble et elle coud, elle fronce et je couds,… une équipe du tonnerre! Mais attention, il faut qu’on se ménage aussi. Beaucoup de couturières sentent leur dos et leur nuque à force d’être penchées sur leur machine, des aiguilles se cassent et des machines rendent l’âme. On garde un bon rythme mais hors de question de l’épuiser à coup de 8h de couture par jour. Elle est retraitée quand même! 

Grâce à elle, on voyage dans le temps. Je découvre son atelier de couture où elle passait des journées entières avec Hubert, son mari qui était tailleur “et les costumes d’avant, ça tenait! Pas comme les loques de maintenant qui n’ont plus de tenue!”. 

Je m’essaie à la vieille Singer, sur laquelle il faut pédaler et “garder le rythme”, je découvre les ciseaux avec un mode d’emploi, les outils qu’on ne connaît plus maintenant. Puis Carmen s’exclame “ça manque un peu de musique, non?”. Elle m’indique où il y a une vieille radio, celle de son fils quand il était étudiant. Je m’amuse à trouver une fréquence qui nous plaira toute les deux “tire l’antenne et mets-la près de la fenêtre, ça captera mieux”. Je me replonge en enfance quand je voyais le même genre de radio chez mon grand-père. 

Que c’est bon de tisser des liens, de prendre le temps, de partager malgré ce qui se passe dans le monde actuellement. Nous sommes en crise mais j’ai rarement trouvé autant de sens dans tout ce que je faisais et dans toutes les rencontres que j’ai faites dernièrement. 

Il est temps d’arrêter, on va se dégourdir les jambes dans le jardin, on profite du soleil un peu timide, on s’émerveille devant les fleurs, on se demande si les pommiers vont bien donner cette année et si le potager pousse. Il est temps de se dire au revoir: “Demain, même heure? Comme d’habitude?” Nous n’avons passé que deux après-midi ensemble mais c’est déjà une habitude 🙂 Oui, à demain Carmen, repose-toi bien!